En cette journée de Bell cause pour la cause, où la prévention de la santé mentale est mise de l’avant, j’ai envie de vous partager un texte que j’ai écrit sur la dépression et le suicide. Un texte qui se retrouve dans le recueil “Fais le mâle, mais fais-le bien” que j’ai lancé l’automne dernier.
Mais avant, si vous en n’avez pas entendu parler, je vous partage le lien vers le documentaire “Les gars, faut qu’on se parle” avec Jean-Nicolas Verreault, qui est disponible gratuitement en ce moment. Alors, messieurs, il n’y a pas de raison de prendre un 40 minutes de votre temps pour l’écouter.
Maintenant voici mon texte “Le suicide, l’ultime fuite”. Bonne lecture!
Sans avoir à vous donner de statistiques, tout le monde le sait, les hommes sont beaucoup plus nombreux à choisir de quitter ce monde avant leur temps. Avec les transformations que nous vivons en ce moment et l’accélération du processus d’évolution, autour de moi, j’observe de nombreux hommes en mal de vivre.
Certains mettent le blâme sur l’absence d’un vrai modèle d’homme, un modèle qui, autrefois, était simple et évident. L’homme était le seul pourvoyeur de la famille, fort, travaillant et infatigable. La transformation du rôle de la femme a poussé l’homme à devoir s’adapter à un nouveau modèle de société. De pourvoyeur, il a tout d’abord affiché sa nouvelle virilité en devenant « macho ». Ne répondant pas à ce que les femmes attendaient de l’homme nouveau, il prend ensuite la voie de l’homme rose, mais les femmes l’ont très vite trouvé peu solide et trop mou. Il essaye une dernière recette qu’il croit « gagnante » : le macho avec un petit bout rose. Sans trop de succès, encore aujourd’hui, il ne sait plus quelle couleur adopter. Alors, il est tout simplement devenu bleu, parfois de colère, d’autres fois par manque d’air. Bleu, un peu comme les Stroumpfs du Belge Peyo, semblant tous pareil, mais différent par l’expression d’une habileté ou d’un trait de caractère : Stroumpf bricoleur, Stroumpf cuisinier, Stroumpf maçon et surtout Stroumpf grognon.
Les hommes, eux, ne sachant plus comment exprimer leur nature masculine, se sont totalement investis dans leur situation professionnelle pour tenter d’y retrouver une identité. Cependant, les effets de la mondialisation: comme les fusions, les coupures, les rationalisations, les restructurations, les ont mis face à de grands bouleversements: réaffectation, perte d’emploi, réorientation de carrière, départ précipité à la retraite, qui a provoqué de la grogne, une perte d’estime d’eux-mêmes, de la dépression. Les voilà retournés à la case « départ ».
L’opportunité était offerte de travailler sur nous et nombre d’entre nous sont restés là, sans profiter de l’occasion. Pendant ce temps, de nombreuses femmes cheminaient intérieurement et plus elles se transformaient et plus notre mal-être devenait aigu. Inconscients, nous choisissions plus souvent la fuite et, parfois même, nous n’avions pas le temps de fuir qu’elles étaient déjà parties. Dur pour l’orgueil de mâle! Là, plus question de fuir! Ah! ce subtil réflexe de la fuite, je l’ai observé souvent chez moi.
Lorsque je vivais de l’inconfort, je croyais que je me respectais en choisissant de quitter, un emploi, une conjointe, un appartement ou toute autre situation. Évidemment, cet inconfort, je le retrouvais dans l’emploi suivant, la relation suivante ..., il me suivait partout. C’est probablement parce que je sentais qu’il me suivrait aussi jusque dans la mort que je ne suis pas allé jusqu’à l’ultime fuite: le suicide. Mais ce mal-être était tellement intense que j’ai très souvent été tenté de me laisser glisser dans ce vide sans fond. Ne croyant plus en rien ni en personne, je ne voyais plus aucune sortie de secours, aucune lumière au bout du tunnel. Chacun de mes anniversaires de naissance me mettait dans un état épouvantable, comme si le jour de ma naissance était une porte qui me ramenait au choix de m’incarner. J’avais beau me convaincre que mon âme avait choisi de plein gré cette incarnation terrestre, il y a eu des moments où j’étais prêt à prendre le risque de mettre fin à cette vie et même, s’il le fallait, en repartir une autre à zéro. C’est justement un anniversaire, mon quarantième, qui a semblé me guérir de cette envie profonde de mettre fin à mon contrat sur cette terre. Depuis mon enfance, j’ai toujours eu l’impression de venir d’une autre planète, de ne pas être né à la bonne place. J’espérais qu’E.T. vienne me chercher et m’emmène avec lui sur sa planète où je croyais pouvoir être mieux qu’ici. Eh! Bien oui, E.T. est venu me chercher. E.T. c’est moi, Éric Trudel. Je me suis accueilli, ici même à l’intérieur de moi, pas besoin d’aller nulle part ailleurs. Après quarante années de traversée du désert, je découvrais enfin que mon « chez moi », ma planète, c’est au plus profond de moi. Bienvenu, welcome, je suis heureux d’être enfin arrivé. « Et c'est pas fini, ce n’est rien qu'un début, le vrai soleil, on ne l’a pas encore vu, et jusqu'aujourd'hui, on n’a rien vécu, la grande extase, on ne l’a pas encore bu, non ce n’est pas fini, ce n’est rien qu'un début, mais c'est le plus beau des commencements » (extrait de la chanson« Et c’est pas fini » de Stéphane Venne).
Non, ce n’est pas fini. Non, je ne vis pas en permanence dans la béatitude et l’extase divine. Oui, je vis encore des moments de doutes, d’inquiétudes, de remises en question, de bouleversements intérieurs, mais j’effleure aussi à l’occasion des moments de plénitude, simplement à regarder la brume du matin se lever sur le lac, à sentir l’odeur de la terre après une averse, à écouter le silence du matin, à goûter un fruit fraîchement cueilli. Cette beauté que mes sens perçoivent n’est en fait que le reflet de la beauté qui m’habite dans la conscience de l’Unité de toutes choses. Tout ce qui m’entoure, tout ce que je vois, tout ce que je vis sont ma propre création, une seule et même création. Alors, pourquoi ne pas créer la beauté. « Non ce n’est pas fini, c’est rien qu’un début, mais c’est le plus beau des commencements ».
Tiré du recueil “Fais le mâle, mais fais-le bien”
Les enfants nous causent parfois des inquiétudes, mais quand on làche prise c`est le contraire qui peut se produire, si on vit le moment présent! 👌💕❤👍
Très beau texte qui fait du bien même dans ma quatre vingtième année 👏👏❤️❤️